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Le Viol Conjugal : Banalisation d’un acte destructeur !

Un article de Rim Kabbaj / Université de Droit et de Sciences Politiques à Reims.

Le Viol Conjugal est insidieux car il fait croire à celle (ou celui) qui le subit que c’est la normalité. La violence conjugale est protéiforme et peu perceptible des protagonistes. Elle s’étend des violences avérées à des gestes d’apparence anodine.

Instaurer une typologie claire peut être utile pour déterminer ce que sont des situations de violences conjugales, qui comptabilise la diversité des situations sans hiérarchie. Les effets de répétition et de cumul des actes violents les rendent toutes destructrices.

Les insultes, le harcèlement psychologiques répétés et les agressions physiques et sexuelles constituent le premier niveau du calvaire. Le cumul des violences et leur répétition forment le second niveau.

La probabilité des situations de violence augmente avec la multiplication des unions. Les femmes font souvent face à un partenaire violent lors qui se transforme à cause du non-consentement au rapport sexuel. Les violences conjugales n’épargnent aucun milieu social, plus particulièrement chez les femmes au foyer où les chômeuses, personne n’est épargné.

Les maris violents ne sont pas forcément des pères violents. Parler des violences faites aux femmes est un phénomène récent surtout au Maroc mais il reste toujours un sujet tabou. C’est aujourd’hui un enjeu politique. Il est intéressant de noter qu’il y a une trentaine d’années, les femmes victimes de viol n’osaient pas porter plainte par peur de ne pas être crues ou d’être pointer du doigt et ainsi d’être dévalorisées par le reste de la population surtout de s’entendre dire qu’elles étaient d’une manière ou d’une autre responsable.

Parler de violences et particulièrement de celles faites aux femmes démontre une évolution de la société marocaine et paradoxalement une amélioration du statut de la femme. Parler des violences faites aux femmes, c’est reconnaître qu’elles ne vont pas de soi, et qu’il y a bien atteinte à la personne humaine.

Ainsi, brise le silence qui entoure les situations de violences conjugales permet-il en outre, de déterminer ce que sont ses situations de violences, et de briser l’isolement des victimes. En effet beaucoup de victimes relativisent ou cachent les violences qui leur sont faites.

Le harcèlement physiologique est difficile à nommer, à considérer comme une violence d’autant plus si les victimes sont déjà dans une position de faiblesse. Parler du vécu des victimes permet de prendre conscience de leur souffrance, de nommer les formes de violences et ainsi faire prendre conscience à la puissance publique qu’il ne s’agit pas d’épiphénomènes ou de gestes de l’intime mais bien de geste lié à une situation de domination. En effet les femmes violentées ont rencontré et rencontrent d’énormes difficultés à porter plaintes contre leurs maris.

Les luttes politiques pour l’égalité juridique, les différentes campagnes d’information, l’évolution du statut juridique des femmes ont permis de faire en partie admettre l’illégalité de ses violences et la nécessité d’un traitement judiciaire de celle-ci.

Parler de violence, briser le silence est primordial. Cependant cette démarche se doit d’appartenir un ensemble politique et juridique plus globale sur la place des femmes dans la société marocaine.

La culture du viol existe dans les chambres à coucher du Maroc. Le viol conjugal se construit à travers le mythe de l’agresseur monstrueux qui est censée être l’homme qu’on a épousé pour le meilleur ou le pire. Dans bien des cas, des femmes se font agresser par leur conjoint dans l’intimité de leur chambre, une réalité trop souvent ignorée. Bien que le sujet demeure tabou. Trop de femmes subissent ces agressions, elles ont le droit de dire non. Il faut briser la loi du silence.

Le viol conjugal existe et il faut lutter afin que ces violences cessent enfin. Le viol conjugal peut se matérialiser de façon perfide et hypocrite, un mari amoureux de sa femme aux yeux de la société qui se transforme aussitôt en un homme violent et avide de domination au lit. Ceci commence par un non-consentement de la femme. Dès lors, l’homme choisit de se laisser dominer par son désir et par son manque d’écoute et finit par violer sa femme. Cette insistance n’est pas respectueuse. Il finira par assouvir son désir et en se déchargeant sur elle bien qu’elle n’ait pas consenti. Elle avait pourtant le droit de dire NON et il avait le devoir de respecter ce non. Embrasser ou caresser quelqu’un ne signifie pas que l’on veuille aller plus loin. L’homme sent de plus en plus sa place de mal dominant après avoir réalisé cet acte ignoble envers sa femme. Il ressent un sentiment de jouissance et de supériorité, il a aimé. Il ressent le besoin et la nécessité de reproduire cet acte, petit à petit, une dynamique sournoise et subtile s’est établie.

La violence dans les mariages s’inscrit dans une dynamique de manipulation. Généralement, l’homme manipulera sa femme de façon à ce qu’elle perde toute confiance en elle, jusqu’à ce qu’elle pense qu’elle ne mérite pas mieux.

Malheureusement, beaucoup croient encore que pendant le mariage, le consentement sexuel est implicite, et que le viol conjugal n’existe pas. Mais au contraire, il est important dans tout contexte de constamment renouveler le consentement sexuel et de savoir qu’il peut être retiré à tout moment.

La culture du viol en est une preuve directe. Notre société approuve la violence sexuelle, il faut pas se voler la face, mais la façon dont on traite ces abus et les femmes en général est symptomatique de cette banalisation. On remet en questions les victimes, et seulement un infime pourcentage des agresseurs sont condamnés. Il est alors très difficile de dénoncer, car le soutien est minime. Tant et aussi longtemps que la victime sera accusée d’être fautive et que l’agresseur sera protégé par notre système de justice et par notre société, le tabou perdurera. Les gens ne veulent pas voir leur conjoint(e) comme un violeur ou un agresseur. De plus, il est extrêmement difficile de s’avouer victime d’une personne qu’on aime.

Le mythe qui veut que tout agresseur soit un monstre que l’on rencontre dans une ruelle sombre, qu’on peut identifier facilement et qui est sans aucun doute une mauvaise personne, ne fait que renforcer ce tabou du viol. Il est temps de revoir notre vision de ce stéréotype de l’agresseur sexuel, car il est très loin de la réalité.

Les femmes se doivent d’être claires et les hommes ont l’obligation de respecter leur volonté. Le consen¬tement doit être perçu comme quelque chose de beau et de nécessaire : que le conjoint demande à sa partenaire si elle aime ce qu’il lui fait. Il faut rechercher la communication à travers l’acte. Une habitude que l’on doit prendre pour harmoniser les relations entre maris et femmes.

Rim Kabbaj/ Université de Droit et de Sciences Politique à Reims.

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