Psychologie

PSYCHOLOGIE : Le Harcèlement Scolaire…Le reconnaître, pour mieux le combattre !

1,2 million. C’est le nombre d’élèves, en primaire ou au collège, concernés par le harcèlement scolaire. Insultes, brimades, coups,… autant de mauvais traitements quotidiens infligés aux «  têtes de turcs » ou « souffre-douleurs »…

Par manque d’effectifs, de temps, de formation, les instances scolaires ne détectent pas toujours ce fléau. Pourtant la souffrance, bien réelle, d’un enfant victime de harcèlement se manifeste de plusieurs façons. Elle peut donc être repérée. Et combattue.

Qu’est ce que c’est ?
Le harcèlement peut se définir comme le fait de soumettre une personne ou un groupe de personnes à des violences psychologiques et/ou physiques de façon répétée. Dans le cadre scolaire, l’agresseur est souvent constitué par un groupe d’élèves qui désigne un camarade comme bouc-émissaire et souffre-douleur.

Les violences physiques peuvent prendre la forme de bousculades, de coups, de rackets, de dégradations de matériels ou, dans les cas les plus extrêmes, d’agressions à l’arme blanche. Les violences psychologiques consistent en des menaces, des actes d’intimidation, d’humiliation ou encore de chantage.

Très difficiles à détecter, ces faits ont lieu à l’abri du regard des adultes, dans les intercours, les toilettes, les recoins isolés des cours de récréation ou encore dans les vestiaires lors des heures de sport.

Un phénomène nié
L’école occupe une place particulière dans notre imaginaire collectif : celle d’une institution à laquelle nous confions nos enfants, afin de leurs permettre de construire leur avenir mais aussi de se construire en apprenant les règles de la collectivité, et de les préparer à leur vie d’adulte.

L’école est donc pensée comme un lieu ‘constructeur’ et ‘protecteur’ pour les enfants, mais également comme un lieu d’intégration. Autant de valeurs qui s’opposent radicalement aux qualificatifs d’une situation de harcèlement : elle détruit l’estime de soi et empêche la construction identitaire, elle est une exclusion de la victime du groupe harceleur et se décrit par des actes violents.

Entendre l’existence de phénomènes de harcèlement dans l’enceinte scolaire implique donc une totale remise en question des représentations que nous portons sur elle. Comme tout changement, elle provoque des résistances de la part des adultes, notamment parce qu’il serait trop effrayant d’accepter une réalité dans laquelle son enfant fut en danger durant toutes ces années, qu’il l’est et le sera chaque jour passé à l’école sans que personne ne puisse réellement le protéger.

Par ailleurs, reconnaître le harcèlement implique une profonde remise en question de nos propres perceptions de nous-même en tant que parent : « Comment n’ais-je pu rien voir ?… »

Les mécanismes du harcèlement
Il s’agit d’un phénomène de déshumanisation : le groupe harceleur réduit l’individu harcelé à la seule caractéristique qui le différencie des autres élèves. Sans cette déshumanisation, les violences ne pourraient avoir lieu car le groupe risquerait de s’identifier à la victime.

La principale raison de l’élection d’un élève en tant que bouc-émissaire est une caractéristique qui le différencie de ses camarades et qui leurs renvoie leurs propres failles. Il peut s’agir de l’élève brillant qui sera exclu car il souligne une réussite à laquelle le groupe harceleur ne peut prétendre, de l’élève de confession juive ou musulmane que l’enfant maltraite pour tenter d’adhérer aux idéologies racistes de ses parents, ou encore d’un élève qui assume ses attirances homosexuelles à la différence des harceleurs qui luttent pour les refouler.

La victime renvoie donc une image altérée au harceleur, elle lui parle d’une souffrance qui ne peut être reconnue puisqu’elle n’est pas nommée. Ce qui blesse est donc projeté sur l’autre, pour mieux l’expulser de soi et pouvoir la détruire : en attaquant la victime, réduite à cette caractéristique.

Quelles conséquences pour la victime ?
L’adolescence est une période difficile et angoissante du fait des changements physiques et psychologiques qu’elle implique. Subir un harcèlement peut donc considérablement entraver la construction identitaire. L’élève maltraité ne peut se percevoir autrement que ‘minable’ dans les yeux de ses agresseurs et risque d’intégrer cette perception de lui-même.

La confrontation à la violence engendre également un grand sentiment d’insécurité qui se traduit par des attitudes défensives telles que les pleurs, les plaintes ou les processus d’évitement. La victime développe un sentiment de honte et de culpabilité car elle se perçoit comme faible et incapable de se défendre. La crainte d’être perçu comme ‘une balance’ ou un ‘fils (ou fille) à maman (ou à papa)’ explique bien souvent l’enfermement des victimes dans le silence.

Les conséquences d’un tel vécu sont très importantes, les répercussions sur la santé physique et psychologique sont indéniables : troubles somatiques (migraines, douleurs intestinales), troubles du sommeil, troubles alimentaires, épisodes fiévreux au coucher ou le matin avant de se rendre à l’école, agressivité, colères, malaises, isolement, mutisme, phobie scolaire, dégradation des résultats scolaires, scarifications, tentatives de suicide.

Ces conséquences ne surviennent pas dans l’immédiat car la victime essaie tout d’abord de s’adapter en tentant de minimiser les évènements ou en se convainquant qu’ils vont cesser. Arrive ensuite la sidération, c’est-à-dire la limite au-delà de laquelle l’adolescent ne parvient plus à supporter la violence. La victime est alors envahie par l’angoisse qui empêche le fonctionnement de la pensée : la détresse psychologique est telle qu’elle peut pousser au suicide dans l’espoir de la faire cesser.

Comment agir ?
L’intervention de l’adulte est indispensable, tant pour la victime que pour le groupe harceleur qui agit pour détruire sa propre souffrance. Les adolescents sont en effet fragilisés par les modifications de leur corps et de leur psychisme, ils sont à la recherche de leur propre identité par une alternance de mouvements d’identification et de rejet de comportements observés chez les autres.

L’adulte doit donc intervenir en apportant une parole symbolique. Celle-ci doit être perçue et vécue comme protectrice pour la victime et comme ‘acte de pensées’ pour les harceleurs. L’encadrement scolaire doit en effet comprendre ce qui est renvoyé par la victime de différent et de questionnant pour les harceleurs, et leurs donner les moyens de penser leurs souffrances et leurs angoisses.

Cette pensée peut prendre la forme d’un débat au sein du collège et de la classe ou d’un apport de connaissances : discuter du racisme, de l’homosexualité, des différences de culture ou de perception etc…

Chaimaa Bellakhdar (js)/Le7tv

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