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LES LUMIÈRES DU RAMADAN (épisode 12) LE PLUS GRAND DES HISTORIENS

Une série de Abderrazzak Boussaid

De son nom, Waly-Al-Din Abd Al Rahman Ibn Muhammad Ibn Khaldoun (1332-1406) إبن خلدون…

Il est né à Tunis d’une grande famille de notables émigrés d’Andalousie. Tout jeune il est plongé dans les drames d’un siècle maghrébin en particulier (et arabo-musulman en général), en plein déclin…

Ibn Khaldoun n’est pas simplement l’un des plus grands historiens arabes, c’est aussi un savant à la dimension universelle. Auteur d’une immense « Chronique Universelle » elle-même précédée d’une non moins impressionnante introduction, « la Mouqadima » (Les Prolègomènes), où il expose sa philosophie de l’histoire…

Il est le premier théoricien de l’histoire, celui dont l’œuvre au 14e siècle, va marquer l’apparition de l’Histoire en tant que science !…C’est celui avec qui l’Histoire est passée de la littérature à la science. Celui qui a été le plus grand Philosophe et Historien que l’islam ait jamais produit et l’un des plus grands de tous les temps…

Mais Ibn Khaldoun est aussi un « sauveur »: Alors que la civilisation arabo-musulmane commence à sombrer dans l’assoupissement qui va favoriser, quelques siècles plus tard, l’essor du colonialisme, il entreprend patiemment, malgré toutes les péripéties que connaît sa vie privée, un large travail de recension et de recherches. Sans ses travaux, l’histoire du Maghreb serait bien incomplète aujourd’hui. Il est ainsi, celui dont l’œuvre éclaire une étape très importante du passé des pays qui sont aujourd’hui placés dans une situation de sous-développement…

En 1348, il a quinze ans et la grande Peste noire, dont l’horreur le marquera toute sa vie, le rend doublement orphelin. Elle emporte ses parents et ses maîtres, avec lesquels il avait commencé à assimiler l’essentiel du savoir de son temps : poétique, historiographie, théologie, jurisprudence et philosophie…

Toute sa vie se passera en succession de charges honorifiques dans la diplomatie, la magistrature, la chancellerie, et de disgrâces, prison y compris, au service de princes usurpateurs, envahisseurs, en proie aux rivalités de clans, aux assassinats, forfaitures, et guerres intestines. Il vivra successivement en Tunisie, au Maroc, en Algérie, en Andalousie et en Orient…

Mais de ce chaos, cet esprit génial saura lire l’ordre caché. De cette anarchie il fera émerger les lois de l’Histoire comme science, les principes de son étude à travers l’analyse de l’ensemble des phénomènes sociaux !… Pour lui, l’Histoire forme donc une branche importante de la philosophie et mérite d’être comptée au nombre de ses sciences…

Sa réflexion le conduit à analyser la critique historique, l’incertitude des chiffres, les causes des erreurs, l’homme comme animal politique, les sept climats de la géographie humaine, l’influence de l’air sur le comportement humain, les classes sociales, l’aptitude aux arts, les langages et les sociétés… bref sa pensée embrasse l’ensemble des phénomènes sociaux, et sa lucidité devant les drames de son temps est sans détour…

La sociologie est pour lui auxiliaire de l’histoire, cette « science nouvelle ». Sa pensée est éminemment réaliste, logique, il se méfie de la raison spéculative. Il étudie les symptômes et maux dont meurent les civilisations…

Sa vie entière, véritable reflet de son temps, fut parsemée de drames (il a perdu sa femme et tous ses enfants dans un naufrage). En outre, ni son enseignement ni sa « Mouqadima » ne firent d’émules ou de successeurs… Sa pensée se perd dans les convulsions des siècles de déclin du monde arabo-musulman pour n’être redécouverte que 300 ans après sa mort !…À suivre.

Abderrazzak Boussaid/Le7tv

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