Le journaliste algérien Rabah Karèche, incarcéré depuis mi-avril, a été condamné ce lundi à un an de prison dont six mois ferme pour diffusion de « fausses nouvelles », a indiqué son avocate à l’AFP. Par ailleurs, un autre tribunal a confirmé en appel la condamnation à deux ans de prison ferme de Chems Eddine Laalami, figure du mouvement de protestation populaire du Hirak, selon le Comité national pour la libération des détenus (CNLD).
Le pouvoir algérien a la main lourde quand il s’agit de ses opposants. Ce lundi 11 octobre, le journaliste Rabah Karèche a été condamné à six mois de prison ferme tandis que Chems Eddine Laalami, figure du Hirak, a écopé en appel de deux ans ferme.
« Nous sommes choqués par ce verdict. Il n’a rien fait. Il a simplement relaté des faits. C’est une décision qui ne s’explique pas judiciairement », a dénoncé auprès de l’AFP Me Zoubida Assoul, évoquant « une décision plus politique que judiciaire » concernant le journaliste Rabah Karèche.
M. Karèche « sera libéré dans cinq jours », date à laquelle il aura purgé la totalité de sa peine en tenant compte de sa détention provisoire pendant la durée du procès, a précisé l’avocate.
Lors de son procès en appel le 4 octobre à la cour de Tamanrasset (sud), le parquet avait requis 18 mois de prison ferme contre le journaliste du quotidien Liberté.
M. Karèche était poursuivi notamment pour « diffusion volontaire de fausses informations susceptibles d’attenter à l’ordre public ».
Il lui est également reproché la « création d’un compte électronique consacré à la diffusion d’informations susceptibles de provoquer la ségrégation et la haine dans la société » et d’avoir porté « atteinte à la sûreté et l’unité nationale ».
En première instance, le journaliste avait été condamné le 12 août à un an de prison, dont huit mois ferme, par le tribunal de Tamanrasset.
Rabah Karèche a été inculpé et écroué le 19 avril après avoir publié, dans son journal et sur sa page Facebook, le compte-rendu d’un mouvement de protestation des Touaregs, minorité berbère locale.
De son côté, Chems Eddine Laalami, figure du mouvement de protestation populaire du Hirak, poursuivi dans trois affaires, a été condamné « à 2 ans de prison ferme assorti d’une amende de 200.000 dinars (plus de 1.200 euros) pour chaque dossier », a précisé son comité de soutien.
Lors du procès en appel le 4 octobre, le parquet avait requis contre Chems Eddine Laalami, dit Brahim, « l’aggravation de la condamnation prononcée en première instance ».
Laalami était poursuivi pour « discours de haine, outrage à corps constitué, diffusion de fausses informations » et « incitation à attroupement non armé », a rappelé le CNLD.
Arrêté fin juin par les garde-côtes algériens alors qu’il tentait de traverser la Méditerranée, Brahim Laalami avait été placé sous mandat de dépôt le 4 juillet.
Le tailleur âgé de 30 ans avait manifesté en février 2019 à Bordj Bou Arreridj pour dénoncer la candidature à un cinquième mandat présidentiel du défunt président Abdelaziz Bouteflika.
Un soulèvement populaire pacifique avait éclaté peu après dans les grandes villes algériennes, forçant Bouteflika à démissionner deux mois plus tard. Depuis, M. Laalami a été arrêté à plusieurs reprises, poursuivi et condamné lors de différents procès.
Le militant s’était notamment vu infliger trois mois de prison à l’issue de sa tentative d’émigration clandestine. Plus de 200 personnes sont actuellement emprisonnées en Algérie en lien avec la contestation et/ou les libertés individuelles. Des poursuites fondées, pour beaucoup, sur des publications sur Facebook critiquant les autorités, d’après le CNLD.
Plusieurs journalistes algériens sont par ailleurs actuellement en détention, parmi lesquels Mohamed Mouloudj, également du quotidien Liberté, inculpé et écroué à la mi-septembre pour « appartenance à une organisation terroriste » et « diffusion de fausses informations ».
L’Algérie occupe la 146e place sur 180 pays du classement mondial de la liberté de la presse de l’ONG Reporters sans frontières (RSF).