Dans sa « guerre » contre le Covid-19, les gouvernements semblent avoir négligé l’impact psychologique que peut avoir le confinement sur nos esprits. C’est ce que pense les psychiatres, qui prodiguent leurs conseils pour mieux gérer cette situation exceptionnelle !…
Le confinement peut-il avoir un impact sur notre santé mentale ? :
Ce qui est merveilleux, c’est que l’être humain est assez adaptatif. Mais je il faut en parler, travailler maintenant pour diminuer l’impact psychologique qu’aura le confinement dans les semaines à venir…
Il y a à la fois une peur liée à la maladie et une autre liée au confinement. Depuis les annonces des gouvernements, on a constaté une augmentation de la téléconsultation en psychiatrie !…
D’où viennent ces peurs ? :
À cause du confinement, nous faisons exactement l’inverse de ce qu’on avait l’habitude de faire. En temps normal, nous sommes dans une société plutôt individualiste, avec des sollicitations multiples !…
Là, on passe d’un seul coup à un mode de vie communautaire, avec des sollicitations réduites. Dans certaines populations, comme en Afrique, c’est assez classique de vivre avec ses frères et sœurs, ses parents, ses grands-parents… Mais pour les pays occidentaux, c’est assez perturbant !…
Pour l’humain, qui est un être de rituels, tous ces changements sont très violents. Avoir du temps peut aussi être angoissant. Et en plus de ça, il y a une tension palpable à cause de la maladie.
Certaines personnes en souffrent-elles plus que d’autres ? :
Tout dépend de la façon dont on est confiné. Mais on pense que personne n’est épargné. Après, évidemment, les populations à risque sont celles qui étaient déjà fragilisées psychologiquement avant l’épidémie. Celles sujettes aux crises d’angoisse, les claustrophobes !…
Et également ceux qui sont atteints de troubles psychiatriques. Pour ceux-là, il y a une double peine : vivre avec l’angoisse ambiante et avec la peur de ne plus avoir leur traitement, de ne plus pouvoir parler avec leur thérapeute !…
Psychologiquement, quels sont les risques du confinement ?:
Tout d’abord, d’inverser le rythme jour/nuit, de décaler progressivement ses horaires en regardant par exemple un écran jusqu’à tard. Le risque est moindre quand on télétravaille, mais malgré tout, on peut avoir tendance à vouloir profiter de l’après-midi, et se remettre au travail le soir !…
On risque également de perdre en estime de soi si on décide de traîner en pyjama toute la journée sous prétexte que personne ne nous voit !…
Cela peut amplifier nos mauvaises habitudes ? :
Au niveau de l’alimentation, le risque est de décaler l’horaire de nos repas. À n’importe quelle heure, de se laisser tenter par la nourriture !…
Alors qu’au contraire, nous devrions diminuer un peu nos apports alimentaires, vu que le confinement réduit notre activité physique. Cette apathie est d’ailleurs accrue par le temps que nous passons en plus sur nos écrans !…
Les fumeurs vont avoir tendance à augmenter leur consommation de cigarettes, tout comme ceux qui boivent de l’alcool régulièrement. Au lieu de prendre un verre le soir, après le boulot, ils vont avoir tendance à attaquer plus tôt !…
Les accros au sport ou aux drogues vont probablement aussi connaître un sevrage un peu brutal, qui pourra générer de la nervosité !…
Cette privation peut-elle en pousser certains à braver les interdits ?:
C’est une grande frustration d’être confiné. Alors effectivement, le sevrage ou la colère que certaines personnalités ont en eux peut augmenter l’intolérance à la frustration, au respect de l’ordre. Et générer, ainsi, des clashes à l’extérieur !…
Les gouvernements devraient-ils mettre en place une cellule psychologique ?:
Actuellement, la profession de psychiatre est sollicitée pour mettre en place des cellules de soutien pour le personnel soignant, qui présente déjà des symptômes de pré-burn out, et qui a besoin de tenir le coup sur la distance.
Que peut-on faire pour réduire son stress ?:
Essayer de faire comme si tout était normal, dans la mesure du possible : se faire un planning semaine après semaine, maintenir son agenda, continuer de se lever à la même heure, de se doucher, de s’habiller, de se maquiller !…
Si on est tout seul, de manger devant sa webcam avec d’autres personnes comme nos collègues le midi, notre famille le soir. D’utiliser avec parcimonie les écrans et les réseaux sociaux. Pourquoi pas tenir un journal aussi, avec nos ressentis, des dessins, des coupures de journaux. Il faut continuer de se sentir acteur de sa vie !…
Et surtout, essayer de voir les choses du bon côté. Cette situation de confinement n’arrivera sans doute qu’une fois dans notre vie. Profitons-en pour se reconnecter à notre famille, pour essayer de réaliser des rêves ou tout ce qu’on n’avait pas eu le temps de faire avant !…
Plus tard, quand le confinement sera passé, j’espère que les gens pourront se retourner sur cette période et se dire que finalement, ils en ont profité pour se poser et réfléchir à leur vie, tout simplement !…
Abderrazzak Boussaid/Le7tv